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Ecrits, pensées, تاملات

Trousseau de clés

  Dépouiller le texte de ses couvertures, de sa croûte et ses bruits. Aller au-delà de son misérabélisme, de son réalisme, de son avant-gardisme. Dépouiller le texte de ses engagements et de ses prétentions...et ne laisser que des mots. Et une voix infime qui murmure.

  Dépouiller les mots des résonances qu'ils suscitent dans notre mental. Leur ôter les habits du quotidien trivial. Les dépouiller jusqu'à l'écorce, jusqu'à réduire l'orchestre des mots en items. Une voix infime continue à parler, à vous désigner. 

  Contempler longtemps ces items. Interroger leur agencement, se pencher de plus près sur leur silence. Et tenter de recréer des sons et des échos. Assister avec quelle confusion  et stupeur à l'éclosion d'un autre texte qui sommeillait, espérant des pas qui le traverseraient. Puis, ne savoir plus que faire une fois pris dans ce labyrinthe. La voix s'annonce plus claire et le voilà entamé un bien étrange voyage. 

  Parcourir les dédales de ce qui fut un jour un texte, passionnément lu, nonchalamment posé. Les voix du texte se déploient alors, crient, rient, disent avoir vu tous les cieux. Elles font leur festin des délires et des peurs des hommes. Les voix du texte nomment des allées et des landes. Les parois entre le réel et le rêve, entre l'ordinaire et l'époustouflant deviennent si floues, si indéterminables.

  Marcher dans le texte. Traverser forêts et océans jusqu'au mont, jusqu'à l'arbre de l'écorce. Jusqu'à la table de l'écriture. Malgré l'abattement et l'épuisement, on continue à arracher ses pas car on se rend compte qu'on vide par là même son être encombré. On saigne et on affronte.  On tombe et on se lève. En marchant dans le texte, on marche vers soi. 

  Fermer le livre. Vouloir affronter la vacuité et la qualifier de lâche, mais ne trouver qu'un texte blanchi, appauvri qui vous fait face. Prendre le large pour oublier. Oublier les allées sombres,les forêts redoutables, les rires creux et vaniteux et les liqueurs des passions qui enveniment. Préférer à toutes ces rages la simple errance. 

  Errer longtemps, pieds nus dans les prés de la souveraine. Respirer et dépouiller son être des jugements afin de laisser s'infiltrer les rayons du soleil. Tous ces sentiers, ces dédales, ces ombres, ont rendu les pas plus sereins. 

  Reprendre le texte presque vidé. Considérer sa pauvreté. Et, doucement, palper sa tremblance.

  C'est alors qu'on peut enfin le nommer: une oeuvre.

 

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